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Alain a

Rencontre avec l'artiste, Kim Kyoung-mi

Dernière mise à jour : 3 juil. 2023


- caprice -


D'après les deux ou trois choses que je sais d'elle…

…pour autant que vaille ce que l'on peut connaître d'une personne que l'on rencontre pour la première fois, et pour peu que l'on sache jamais quelque vraie chose de quelqu'un ou quelqu'une — pour ne rien dire de soi-même avant de naître, de soi-même avant que d'être à une respiration encore ou à peine du par-delà —,


d'après ce que je sens d'elle…

…et je félicite lectrices et lecteurs agiles d'avoir très vite sauté, pareilles et pareils à la grenouille du vieil étang du jeune Bashô… directement à ce deuxième paragraphe… sans pour cela négliger d'applaudir ceux et celles, intuitives, portées par l'onde, qui se sont laissées aller à flâner, crapauds, et humer le parfum des détours et des lotus, des feuilles et des fleurs,


d'après ce que je sais d'elle absolument

désormais,

Kim Kyoung-mi n'apprécierait guère qu'une interprétation de ses dessins prétende se substituer à son propre regard, aussi acéré que rêveur, aussi narratif que happé par les séductions sensuelles & graphiques, regard né de sa main et dont elle accepte qu'il ne se définisse que par images et non par mots, que par traits d'encre ou de plomb, ou touches de gouache ou encore réserves (de lumière en péril soient-elles, à moins qu'en péril de lumière) et jamais par pensée consciemment organisée, n'accepterait guère qu'aucune interprétation venant d'aucun autre que ce soit rabatte son dessein créationniste général — ou n'importe lequel de ses personnages particuliers — sur les catégories éprouvées et rebattues de bien ou de mal, de beauté ou de laideur…


Et elle le dit très bien, aux moments où parler elle veut bien.



Chut…

Exultation du trait


Lorsque Kim Kyoung-mi te rencontre, est-ce la première fois ? Si cela est, elle te glissera un curieux regard par-dessus et le blanc de ses yeux dessinera alors

deux ailes battant un instant par le ciel,

et aussi, pour peu que tu l'interroges un peu sur son art, ses paroles dévideront un fil qui n'existait pas une seconde auparavant ou bien qui existait, tant de fois dénoué et renoué à la trame issue de sa main et de son existence, bien avant que ses lèvres des mots prononcent tels les fruits mûris, longuement ou instantanément, dans le secret si secret qu'il ignore même en être un

mais est,

un dessin secrété par l'intime, dessin proliférant, dessein jamais fini et sans cesse redécouvert et pour elle fondateur de pensée inventeuse de mondes



Si c'est une deuxième fois ou une troisième (que vous vous rencontrez), tandis que vous échangez et pour peu que tu aies l'intelligence — souviens-toi que l'intelligence vraie est ce qui relie tout et rien n'arrête — de ne pas,

la pudeur de ne pas, oui, exactement celle-là, la pudeur, l'intelligence de ne pas : alors ses doigts et ses mains et ses avant-bras et ce qui s'y greffe dessinent tantôt dans l'air des formes, courbes, des arabesques, du genre voluptueux, et recouvrent ainsi le flot des paroles qui font ce que savent faire les paroles,

c'est-à-dire raconter et décrire et puis dire aussi entre les mots,

entre les lignes, le silence




Paroles


Kyoung-mi, tu dessines avec quoi ?

Avec un crayon normal, un crayon HB. Par contre j'aime beaucoup changer de marque. Parce que rien que pour les crayons HB, selon les marques la sensation est différente. Moi j'aime bien changer. Je pose mes crayons : ici le Faber Castell, ici le Caran d'Ache, là un autre d'une marque coréenne, là un crayon vraiment scolaire… Alors j'en prends un et si avec lui ça ne marche pas, je prends une autre marque, selon le moment. C'est pour ça j'aime bien m'amuser à m'acheter du matériel…


La couleur du corps du crayon est importante ?

Pour le crayon, non. Mais c'est vrai que je suis très sensible à l'esthétique, ça c'est sûr. Par exemple je préfère Caran d'Ache parce que le packaging , rien que ça est déjà très joli.


Peut-être aussi parce que tu vivais en Suisse ?

Ah oui, c'est vrai. Et c'est vrai Caran d'Ache c'est très bien, la Suisse c'est la patrie du crayon. Et après, je dessine principalement avec un stylo Rotring. Le problème du Rotring c'est qu'il y a un moment où l'encre sèche. Et c'est 40 balles. Or moi je dessine souvent pendant des temps courts, une heure, quarante minutes… Parce que je n'ai pas beaucoup de concentration. Du coup je commence au milieu de la nuit et puis je laisse le Rotring sans le fermer et le lendemain….


Je suis sûrement un peu exigeante mais je garde toujours mon stylo Rotring. J'aime beaucoup, ça m'excite. Même s'il m'arrive de prendre un autre stylo noir, ou si je dessine aussi avec les pinceaux, je reviens toujours au Rotring.


Sur quel type de papier dessines-tu ?

Un papier optimisé pour l'illustration, assez lisse, ni aquarelle ni à grains. Du 180 grammes ou 250 grammes, pour être précise, c'est ça que j'aime bien.


Tu dessines à des moments perdus ?

C'est quoi des moments perdus ? …Ah. Non, je dessine seulement vraiment quand je veux. Quand je ne veux pas ça ne marche pas.


Tu n'as pas de routine ? Dessiner chaque matin par exemple ?

Non, pas du tout. C'est quand je veux, quand ça vient. Je dessine aussi souvent aux moments de récréation. Je travaille comme professeur de dessin à Bois-Colombes, j'y ai mes propres ateliers, ma salle pour les élèves et tout ça et pendant les récréations, les pauses, je dessine. Je peux te dire que pour moi le repos c'est dessiner.


Tu es droitière ?

(elle touche sa main) Oui, je suis droitière.

Alors partout, j'ai beaucoup beaucoup de carnets, même chez moi, il y a de tous les formats, et même à côté du lit – je prends souvent des Moleskine, moi j'aime bien (elle rit) – parce qu’au moment où vient l'envie de dessiner je n'ai pas envie de chercher. Je dessine vraiment sur l'instant.


As-tu toujours un carnet dans ton sac pour dessiner ?

Ça maintenant non. Avant, j'avais tout le temps tout le temps un carnet de dessin. Mais maintenant je ne le prends pas, plutôt je prends des notes… Je saute toujours… Si je commence quelque chose, par exemple en ce moment je dessine crapaud et lotus, voilà c'est mon nouveau personnage, le crapaud, sur format raisin. Au moment où je suis en train de créer des personnages, machin tout ça, je prends tout le temps avec moi le carnet. Au moment de la recherche j'ai deux ou trois carnets, pas finis, où je dessine. Après, aux autres moments je ne prends pas le carnet parce que si jamais je le perdais… Et aussi, dans ma tête si j'ai le carnet je me dis « Ah, je suis obligée de dessiner » tu vois ? En plus, si je ne dessine pas, c'est lourd, ça sert à rien. Du coup, s'il me vient une envie de dessiner, bah je prends (elle attrape mon cahier) ce que je trouve et je dessine… Oui… Je prends n'importe quel papier et je dessine. Je fais des gribouillages, du dessin automatique, ou alors je note des idées… Je me débrouille, je peux noter là je vais dessiner ça, lui il pourrait faire ça, lui, etc.


Tout à l'heure tu disais que tu utilisais les carnets pour ta recherche, quand tu crées un personnage ?

Je ne sais pas si la réponse… …Ah, aussi je dois te dire : mon problème c'est je ne réponds jamais à la question. Quand j'étais en Suisse, quand je faisais mes études, devant le jury ça s'est super bien passé tu vois bla bla bla mais la professeure principale elle m'a dit « Kyoung-mi, c'est marrant mais pourquoi en fait tu ne réponds jamais à la question ? » (moue) Ah bon ? Je réponds pas à la question ? Je ne m'en rendais pas compte en fait, tu vois ce que je veux dire ? Je suis souvent en avance, par exemple je peux te dire Alain tu as mangé quoi ce midi ? toi tu me réponds une pizza et moi je te réponds : 4 fromages ! Tu vois, ça avance, je m'en rends pas compte. Ils m'ont dit ça alors je fais attention quand je passe un entretien hyper-sérieux, je prépare prépare prépare…


— Mais là c'est parfait : pour moi tu es en train de raconter exactement comment tu dessines. Exactement. Ta façon de parler ressemble à ta façon de dessiner. Je trouve ça très bien.


— Ah oui ? Bah, merci beaucoup…


— Tu vois tu commences ta réponse ici (je montre un endroit sur mon cahier) puis elle part là (Kyoung-mi fait "oui ? "), puis elle part là ("oui…") puis elle part là ("oui !") et tout d'un coup tu t'inquiètes : « Ah j'ai oublié, j'ai pas dit ça et je voulais le dire… » Éclat de rire


— Exactement. C'est très juste. Tu vois, j'ai toujours une dizaine de dessins en cours. Et je les reprends, je les finis jamais. Je dessine ici un petit peu, là-bas un petit peu, là bas un petit peu… ah moi, j'adore… (réflexion) C'est vrai que le dessin pour moi c'est à moi. (réflexion) Peut-être c'est pareil pour tous les artistes.

En tout cas, moi, je dois continuer à travailler à côté, c'est ça qui doit me financer… Le dessin, je trouve qu'il doit être complètement libre. Ce n'est pas que j'ai plusieurs personnalités, que je suis plusieurs personnes : mais au moment où je dessine c'est ma liberté totale. Moi je ne veux pas vivre ce que je veux simplement c'est


— dessiner ?

(sourire)

…Du coup à côté c'est le travail stable qui me permet de dessiner. Bien sûr en tant qu'artiste j'aime bien faire une expo. Et s'il y a quelqu'un qui me critique, qui fait le commentaire de mes dessins moi je dis que j'en ai rien à foutre. C'est pas joli ? Je m'en fiche complètement, c'est à moi, c'est mon crapaud, ce sont mes cochons… Oui c'est ça, je fonctionne comme ça…


C'est très intime donc…

Oui, c'est très très très intime, vraiment intime. Donc justement, selon le spectateur, ce qu'il regarde ce qu'il ressent (bien sûr il y a des concepts et il faut les expliquer parce qu'il y a des gens qui ne comprennent pas), mais si quelqu'un comprend tout à fait autre chose dans mes dessins… Moi je suis d'accord, je dis Oui c'est votre regard, c'est votre problème. Par exemple quand on me dit Ah mais vos crapauds c'est moche, pourquoi vous dessinez ça ? (je réponds) Vous vous avez pensé comme ça mais pour moi c'est hyper sexy, je trouve ça très bien, voilà… Pareil pour les abattoirs. J'ai remarqué que lorsqu'ils les voient, plein de gens dans la mouvance écologiste, vegan, végétariens (moi, je ne suis pas du tout végétarienne) m'ont félicitée : – ah, Kyoung-mi tu es végétarienne ! – Ah non. Pas du tout.

J'adore la viande. Franchement, le cochon c'est trop bon, non mais c'est vrai, le cochon c'est meilleur que le bœuf. Et eux : « Ah bon ? Moi je croyais que tu es végétarienne… » Ah non, moi pas du tout. Non mais ça va pas ? (elle rit) Sans viande je ne peux pas vivre, moi j'adore manger des choses, des sucreries… Des produits tu vois ? Des fois on me dit ça c'est du bacon bio, mais en fait, bio ça veut rien dire… Du coup… Ah oui, je disais quand j'ai des personnages…

(silence)


…Comment les personnages arrivent ?

Alors avant j'aimais beaucoup les Ours…


Raconte-moi pour les Ours

Très intimement, selon qui je rencontre… Les personnes m'inspirent beaucoup. J'aime beaucoup rencontrer les gens. Pas forcément des artistes, pas forcément dans le domaine de l'art, moi j'adore c'est ça qui m'inspire et j'apprends beaucoup sur les relations humaines parce que je suis, je n'aime pas trop le mot sauvage mais tu vois…

Donc c'est selon qui je rencontre, ce sont les copains, les ami.e.s, ceux qui comptent et tout ça, ce sont ces personnes qui m'inspirent… Alors les cochons. Honnêtement je ne sais plus pourquoi j'ai choisi le Cochon (rire étouffé) mais il y a eu un moment où je me suis mise à aimer montrer des cochons… Ah oui, j'ai commencé à réfléchir un jour où j'ai regardé un documentaire sur Arte qui disait qu'on mange trop de viande pendant la semaine bla bla, du coup ils montraient les abattoirs de poulets machin tout ça (stop). Moi quand j'ai vu ça j'ai pensé : Waou c'est génial ! C'est top. (stop) C'est une image qui ne me fait pas peur, si j'étais dedans je me dirais « Ah, c'est génial » Du coup, c'est ça qui m'a complètement inspirée.


Ça ne te fait pas peur ?

Non. Honnêtement.


Mais ça ne te fait pas peur parce que pour toi de toute façon c'est une transposition de notre vie à nous ?

Je ne peux pas dire non.

Mais en vrai j'ai choisi le cochon parce que le cochon c'est tellement mignon.

En plus c'est un animal très très propre, qui se nettoie tout seul. Donc, je commence à dessiner dessiner… Avant le démarrage d'une planche de dessin je dessine beaucoup partout, dans les carnets, jusqu'à ce que je maîtrise… Par exemple, une piscine : si je prévois une piscine, je vais dessiner des piscines partout, je vais regarder sur internet, je dois en prendre et refaire certains éléments pour les représenter bien… Mes personnages je les dessine dans plein de positions, je les entraîne dans n'importe quel sens parce que je dois maîtriser leur trait. Ensuite, une fois que je suis en place, ben je dessine. Même d'abord au crayon je n'ai pas envie de rencontrer une difficulté…Ne pas arriver à dessiner ce que je veux quand je veux ça me convient pas, c'est mon côté technique, ça me démotiverait. Pour ça je dois maîtriser. Après, la narration c'est autre chose…


En fait, tu as glissé (elle, rit, sait très bien ce que je vais dire) des Ours aux Cochons… Les ours tu n'en as rien dit…

L'Ours, c'est du passé. L'ours ça ne m'intéresse plus. Maintenant c'est les cochons.

Cochon ça m'intéresse parce que c'est moi qui ai trouvé. Crapaud aussi, pareil. Des gens me demandent comment tu peux dessiner cet animal ? Moi je dis : parce que je fais ce que je veux. Pour l'instant je suis Cochon et Crapaud. Je sais on dit que Crapaud c'est laid, c'est série B par rapport aux grenouilles… Mais je crois que le Crapaud est plus stable, plus sage que la grenouille. Et puis en Asie, le crapaud est un symbole de bonheur… Le thème du Crapaud & Lotus, pour moi c'est une symbiose. Dans le temps, la fleur de lotus était une fleur royale, il y a le bouddhisme aussi et tout ça mais surtout il y a que pour que le lotus grandisse bien et s'épanouisse comme un prince il faut que le crapaud travaille.


« Pour que le lotus devienne Prince ou Princesse, il faut que le crapaud travaille… » Tu sais qu'en Europe, dans les contes si une jeune fille embrasse un crapaud il se transforme en prince ?

Oui oui c'est exactement ça ! On juge tout de suite l'apparence… Crapaud vous êtes très laid ! Et on dit : Lotus vous êtes très jolie, très élégante. (Elle soupire :) mais pour tout ça il y a du travail derrière. Le crapaud protège le lotus, qui a un côté faible… Je dessine tout le travail du crapaud qui se tient derrière le lotus, qu'on ne voit pas mais c'est grâce à lui que le lotus fleurit. Dans les mots qui disent ma démarche, j'avais écrit "prolifération". Parce que j'accumule et multiplie, je multiplie, je multiplie… Dès qu'il y a un espace vierge, j'ajoute, je n'en ai jamais terminé. Le terme d'un dessin, pour moi, c'est le moment où j'en ai marre. Mais un mois après, si je le revois je peux toujours y ajouter quelque chose. C'est pour ça que c'est si long…


Tu te décris comme étant de culture coréenne mais avec pour référence l'art européen…

La culture coréenne, je ne peux pas l'ignorer c'est dedans que j'ai grandi, il y a le poids social, l'éducation et tout ça, la mentalité… L'art européen dans le graphisme, oui c'est ma référence. Comme toi je suis très sensibilisée par l'image. Moi je n'arrive jamais à expliquer, mais par l'image je comprends. J'ai un peu la chance parce que je vois que ce sont mes parents qui m'ont totalement donné ça. Je ne lis pas beaucoup mais il suffit que je voie une image et : ah ! ah ! je comprends. Cette sensibilité à l'image est… très sensible. Par exemple il se peut que tout aille bien, j'ai tout installé mon matériel pour dessiner et puis tout à coup une petite fourmi s'amène ! Ça, ça peut me déranger. De toutes petites choses peuvent me déranger… Pour la mentalité, et pour la narration aussi, etc. je suis l'influence coréenne. Mais graphiquement mon dessin est européen. J'aime beaucoup Stéphane Blanquet. C'est un artiste qui a fait beaucoup de livres, mes références vont aussi du côté de l'art singulier… Mmm oui, lui aussi c'est très saturé, il dessine comme ça et c'est un exemple pour moi. Il y a aussi mon professeur suisse, lui il ne dessine pas saturé mais décalé, un côté humain que j'aime.


Lu avait évoqué Topor, moi Crumb…

J'adore. J'adore Crumb. Le genre Kim Deitch, Jim Woodring, j'aime beaucoup. J'admire leur travail, les nuances de noir et blanc et surtout le trait… Et moi en tout cas je dessine pour m'échapper du monde réel, ne serait-ce qu'une seconde, ça me vient de très loin. Rien que le trait, pour échapper, c'est ce qui m'excite. Au sens artistique.


Avec le crayon, tu travailles seulement au HB ?

Je peux passer au 2B, 4B. Tu vois ça ? c'est du 2B, pour avoir des nuances… Et ça je l'ai fait directement. je ne peux pas dire automatiquement, mais c'est l'inconscient, je me laisse guider par les sensations…


Même si c'est en gris et blanc il y a plein de couleurs

Oui il y a des nuances délicates


De ce côté-là ça fait penser à Kandinsky

Ah oui… Tu sais, je suis… je n'arrive pas à vider ma tête. Je parle avec toi et je pense à plein de choses. Pour moi le repos ce serait de vider ma tête, peut-être que ça arrive quand je dors, si je suis vraiment très très crevée mais c'est trop rare. J'ai tellement d'énergie. Je dois dégager cette énergie, la journée je fais du yoga, du pilate, je cours… Je fais du sport pour ne pas penser, pour pas que mon cerveau explose. Là on m'a parlé du flying yoga et je pense que ce sera parfait pour moi, suspendue par une sorte de corde j'aime bien : parce que si je me déconcentre, je suis morte. Tout le temps la pensée, et ça sature, et ça c'est le dessin.

Je vais te montrer quelque chose (sur l'écran du smartphone) : ça, c'est un grand format, 50 70, une peinture noir et blanc à l'encre, sans dessin préparatoire. C'est ma récréation. La nuit, je me réveille : ah je veux dessiner boum boum boum boum rapide, je ne pense à rien, ça m'excite. Artistiquement. Une récréation.


Tout à l'heure je t'ai demandé comment tu commençais un dessin et tu m'as parlé de la forme géométrique. Le dessin commence toujours au même endroit ?

Ça dépend du dessin, je m'adapte. Parfois au crayon j'ai esquissé quelque chose et puis juste au moment du passage à l'encre ça ne me convient plus et je change…


Et où dessines-tu ? Sur une table ?

Le truc c'est que dans les carnets j'aime bien dessiner comme ça. Comme ça. Comme ça. Je dessine, je tourne le cahier je fais ça, vooup, tu vois je dessine, je tourne encore le cahier. Il y a un trait qui m'inspire ; alors il faut continuer. Lui, il va devenir quoi ? Et lui… Tu vois. Après je vois si ça me convient ou ça ne me convient pas : c'est un peu l’idée de rattrapage. Il faut que je sois contente, esthétiquement.


Tu dessines toujours sur une table ou… ?

Oui, je dessine allongée aussi, ouais. Mais le plus souvent par terre, et je fais comme ça. Tu vois le carnet il est là (elle jette le carnet par terre, juste devant elle et s'accroupit, le carnet est presque entre ses pieds, son corps comme en suspens et elle commence à dessiner, épaule, bras, avant-bras, main et geste totalement libres). Même quand je fais la peinture dans ma chambre, c'est souvent comme ça.


Dans ton atelier ou dans ta chambre ?

Mon rêve serait un jour d'avoir un grand grand espace atelier. Là dans l'espace, j'étale tous mes dessins, par terre, voum voum voum voum, tous. Je ne les change jamais, je ne les enlève pas. Pendant 1 an, 2 ans 3 ans… comme ça. Et puis mon rêve c'est je me promène parmi mes dessins et oh, là ça ça m'inspire alors je dessine, un petit peu, la la, et puis je marche je vois soudain quelque chose dans un autre dessin, je m'accroupis voum voum je dessine, vraiment ça c'est mon rêve, ça ce serait le bonheur. Ou bien je rentre du travail, je regarde là, je marche, là, là, mais peut-être à ce moment je n'ai pas envie de dessiner : alors je ne dessine rien. Ou encore c'est le matin et moi, je prends mon petit déjeuner juste à côté d'un de mes dessins… Et ah si ça m'inspire, j'ajoute quelque chose… Ça, c'est mon rêve.

Parce que je n'aime pas ranger un dessin, fermer le cahier, etc. Après avoir fermé on ne voit plus rien. Et pour ouvrir le cahier il faut prévoir… En fait j'aurais besoin de beaucoup d'espace mais maintenant je ne l'ai pas




 

FANTASMA GRAPHIE, exposition solo

26 juin - 16 juillet

Looloolook Gallery

les lundi, mardi, jeudi, vendredi et samedi

11h - 13h et 14h30 - 19h

+ les mercredi et dimanche sur rendez-vous au 06 19 76 26 74



à voir, lire & plus si affinités


.regard sur les œuvres exposées,


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